Prénom et nom:
Audrey Zians
Âge:
28 ans
Surdité et moyens de communication:
Sourde profonde, Audrey est bilingue (signante, oraliste) et implantée.
Fonction:
Depuis octobre 2013 : assistante et chercheuse en droit européen à l’ULg.
Depuis octobre 2015 : avocate chez Bours & Associés, en droit public administratif, de l’urbanisme et de l’environnement
Parcours scolaire:
J’ai fait mes humanités en intégration au Collège Saint-Barthélemy de Liège.
Ensuite, je me suis tournée vers des études de traduction à l’Institut Libre Marie Haps, à Bruxelles. J’ai choisis d’étudier l’italien et l’allemand. Ces études m’ont également donné l’occasion de partir en Erasmus en Italie, à Trieste.
Une fois mon diplôme de master en traduction en poche, j’ai étudié le droit à l’Université de Liège (ULg). Je suis titulaire d’un master en droit depuis juin 2013.
Parcours professionnel:
En octobre 2013, j’ai été engagée comme assistante en droit européen à l’ULg. Mon travail se répartit de la manière suivante :
– Enseignement : point de contact avec les étudiants ; préparation, organisation et animation de séances de cas pratiques ; corrections et suivi des travaux dirigés ; aide à la préparation des cours ; préparation et correction des examens.
– Recherche : rédaction d’articles ou d’ouvrages, seule ou en collaboration avec le professeur ; mise à jour d’ouvrages ; recherches ponctuelles sur divers thèmes de droit européen.
Après deux années à temps plein, je suis passée à un mi-temps, que je combine désormais avec un poste d’avocate chez Bours & Associés.
Difficultés rencontrées :
Durant les études:
Durant mon parcours universitaire, la plus grande difficulté était d’obtenir des interprètes pour les cours, étant donné la pénurie actuelle d’interprètes en Belgique. À l’Institut Libre Marie Haps, j’ai eu la chance d’en avoir pour une grande majorité de cours, mais pas à l’ULg, malheureusement. Il a donc fallu trouver d’autres solutions : étudier dans les syllabus et faire appel aux notes des autres étudiants.
Trouver une interprète sur place pour mon séjour Erasmus a été encore plus difficile. Une fois l’interprète trouvée, il fallait encore réfléchir au financement de celle-ci. Sans oublier le fait que l’interprète sur place ne signe pas dans la même langue des signes qu’en Belgique : j’ai donc dû suivre des cours en accéléré de langue des signes italienne avant de commencer mes cours à l’université de Trieste.
Il n’a pas toujours été facile, non plus, de faire accepter l’interprète par les professeurs.
Une autre difficulté, spécifique à mes études de langue, a été d’étudier les langues dans les mêmes conditions que les autres étudiants. Ainsi, je devais suivre des cours donnés en langue étrangère, passer des examens oraux en langue étrangère, y compris lors de mon séjour Erasmus, où j’ai notamment dû passer un examen de littérature allemande oralement en italien. De plus, certains professeurs évaluaient ma prononciation dans la langue étrangère de la même manière que pour mes camarades entendants. Etudier la prononciation des langues étrangères a été très difficile. Les seuls cours qui ont été adaptés pour moi ont été ceux de compréhension à l’audition : ils étaient remplacés par une compréhension à la lecture.
À l’Institut Libre Marie Haps, ils ont été très réticents à accepter mon inscription. Par exemple, il m’a été dit qu’il ne serait pas possible de me délivrer le diplôme à la fin de mes études en raison du fait que je ne pourrais pas suivre les cours de compréhension à l’audition. Ou encore qu’il était extrêmement difficile pour une personne sourde de réussir ces études. Il a fallu argumenter encore et encore. Par la suite, j’ai pu mener à bien mes études, si ce n’est que l’accès au master d’interprétation m’était interdit.
Sur le marché de l’emploi:
Il ne m’est pas possible de dire avec certitude si j’ai rencontré des difficultés sur le marché de l’emploi ou non. Si discriminations il y a eu, elles n’ont jamais été explicites.
J’ai eu l’incroyable chance de me voir proposer plusieurs offres d’emploi dès ma dernière année de master en droit. Dès lors j’ai pu choisir le poste que je pensais me correspondre le mieux, en l’occurrence ce poste d’assistante en droit à l’université.
Lorsque j’ai postulé pour une place d’avocate, il est vrai que j’ai dû faire face à certaines craintes qui revenaient souvent chez les potentiels futurs employeurs, comme : « Concrètement, comment allez-vous faire pour travailler ? », « Comment vous allez-faire pour téléphoner ? », ou encore « Comment allez-vous faire pour plaider et rencontrer des clients ? » etc. L’important à ce moment-là est de rassurer le futur employeur et de plaider sa cause en mettant en avant ses compétences.
Conseils aux jeunes sourds:
Battez-vous pour exercer le métier que vous voulez et n’écoutez pas les autres.
Distinguez-vous des autres : par de bons résultats académiques, des stages, des formations supplémentaires, la connaissance de langues étrangères ou encore des activités de bénévolat etc.
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